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Mundus

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Au Forum romain

Lors d’une visite guidée du Forum Romain ésotérique nous découvrions le Mundus. C’est un étrange monument qu’on appelle aussi l’Umbilicus Urbis Romae . C’est une construction circulaire, aujourd’hui en briques, qui fait 2m de haut et 4,45m de diamètre. Elle est équipée d’une petite porte qu’on ouvrait trois fois par an, le 24 août, le 5 octobre et le 8 novembre. Le monument actuel date de l’époque de l’empereur Septime Severe, III après J-C, mais il est bien plus ancien. Il est probablement là depuis la naissance de Rome. Il est placé entre les Rostres, la tribune des harangues, et l’arc de Septime Sévère. Comme omphalòs (le nombril) des grecs, le Mundus était le centre du monde, mais pas seulement. C’était aussi un point où le monde des vivants, à travers une ouverture dans le sol, était en contact avec le monde des morts. Selon une hypothèse récente il semblerait que le Mundus fut d’abord un lieu sacré dédié à Proserpine et Ades. Dès la République, le petit édifice était composé de deux parties, la partie inférieur correspondant au Mundus, tandis que la partie supérieure, on suppose, à l’Umbilicus Urbis.

vue sur le forum romain

Mundus Patet

La porte était considérée comme une « porte ouverte » sur le monde des morts. Cette porte était ouverte trois jours par an (Mundus Patet dans le calendrier romain). Ces jours étaient considérés comme particulièrement néfastes et dangereux. Les divinités infernales et les morts sortaient et se baladaient dans la ville. Ces jours étaient le 24 août, le 5 octobre et le 8 novembre et ils coïncidaient avec les jours dédiés aux divinités de l’au-delà. Les Romains pensaient que pour gagner les faveurs des mânes (âmes des ancêtres), il fallait leur permettre de revenir dans le monde des vivants. Les manes protégeaient la famille et garantissaient sa prospérité. Mais, la porte menant au monde des morts étant ouverte, on risquait d’être aspiré par l’au-delà. Ces jours-là, les prêtres accomplissaient des rites mystérieux pour ouvrir la « connexion entre les « mondes ». Ceux qui ne connaissaient pas ces rites ne devaient même pas s’y risquer, ça porterait malheur. En fait, la présomption, envers la connaissance du rite, aurait provoqué la perte de celui qui s’y essayait.

Interpretation

Les sources antiques, à propos du Mundus, sont complexes, incomplètes et contradictoires. L’étymologie même est inconnue. Pour Sextus Pompeius Festus, le Mundus représente l’ensemble du cosmos, « ciel, terre, mer et feu ». Cet homme, qui avait vécu à Narbonne, avait écrit une sorte de dictionnaire traitant la mythologie, les antiquités romaines et la langue latine. Pour d’autres, le mot Mundus vient de munth (terre), ou du sanskrit maņdala (disque, cercle, ou cercle magique lié au monde des morts). Selon Caton, une partie supérieure et d’une inférieure, formait le monument. La partie supérieure représentait l’univers, la partie inférieure, une sorte d’uterus renversé, le monde souterrain. Le contact entre les deux mondes était fermé toute l’année, par une pierre le lapis manalis. Lors des trois jours du Mundus Patet, on enlevait la pierre pour permettre la communication entre les deux mondes. Sur la base de l’indication topographique fournie par Plutarque, on a fini par localiser le mundus près du Comitium, au Forum romain. Il semblerait que l’ombilicus urbis, assimilé à l’omphalos (nombril ) des grecs, était une version tardive du monument.

Mundus Patet

Les dates du Mundus

Le 24 août était lié à l’Opiconsiva (mettre le blé à l’abri), une fête agricole et chthonienne, liée à la déesse Cérès. Le 5 octobre, encore une fête liée au monde agricole, appelée Leiunium Cereris (« le jeûne de Cérès »). Le 8 novembre peut-être une fête lié au triticum, une variété d’épeautre, qu’on semait en novembre? Il y avait-il un souci de créer un lien entre le monde des vivants et le monde souterrain où reposent les semences? Pendant les trois jours du Mundus Patet, on ne pouvait pas faire la guerre, se marier, les activités publiques cessaient. Les portes des temples étaient fermées. Lors des trois jours, il semblerait qu’un enfant descendait dans la cavité souterraine pour observer où les rayons du soleil croisaient l’axe central du Mundus. Ce jour-là, les prêtres accomplissaient des rites étranges pour ouvrir la « connexion » entre les « mondes ». Chez les grecs, à Eleusis, on pratiquait un culte ésotérique et mystérieux de mort et de renaissance lié à Demetra (Cérès). Depuis son enlèvement, Proserpine. la fille de Cérès, se partageait entre le monde des morts, gouverné par son mari et le monde des vivant où régnait Cérès, sa mère.

Ceres

Comment se fait-il que Cérès, la déesse des moissons, était connectée au monde des morts ? Fort probablement, elle avait deux aspects. L’un était terrestre, lié à la naissance, la renaissance, la fertilité. L’autre était de nature chthonienne comparable à une divinité des Enfers. Un lien en relation avec le rapt de Perséphone, sa fille, enlevée par Hadès. Ou simplement parce que le monde vivant a besoin de tirer ses énergies du monde souterrain invisible. Donc, pour certains, l’ouverture du Mundus engendrait un contact vivifiant pour d’autres un contact perturbant. Au début, les prêtresses de Cérès étaient appelées à ouvrir le Mundus. On finira par les comparer aux sorcières. Les prêtresses d’abord, puis les sorcières, attiraient les esprits des morts. Dans la Rome antique, on appelait l’esprit des morts Larves ou « Lemuri« , ou esprits de la nuit. C’étaient les fantômes des âmes qui ne trouvaient pas de paix. Ils vaguaient dans la nuit. Ils avaient souvent eu une mort violente, ou, on ne leur avait pas donné de sépulture. On les commémorait les 9, 11 et 13 mai, pour les exorciser. Alors, les prêtresses leur offraient des bonbons et des sucreries, dont ils étaient gourmands.

bas-relief du tombeau d'Eurisace

Il est probable

Peut-être que l’idée d’un fossé reliant les deux mondes est ce qui reste d’un rite lié à la fondation de Rome. De nombreux intellectuels, dont Dionysos d’Halicarnasse dans son ouvrage « Antiquitates romanae », nous ont donné des descriptions, souvent discordantes, du rite de fondation de Rome. C’était un augure, ce qui marque l’origine étrusque du rite, qui officiait. La fosse, était remplie de prémices. Par dessus, par poignée, la terre de la patrie était jetée sur les prémices. Ceci ressemblait à des offertes faites aux dieux du monde souterrain. Pour d’autres cette fosse avait été créée pour  empêcher aux âmes des défunts de revenir dans le monde des vivants. Pour d’autres, c’étaient une façon un peu tordue de préserver des secrets qui auraient dû continuer à être cachés. Cette dernière information nous la devons au grammairien Festus, personnage du IIe siècle. Selon lui, il était à craindre que les secrets cachés ne soient révélés. Pour éviter toutes divulgations, il était nécessaire de préserver les secrets de rites religieux mystérieux.

décors de la Rome antique

Le fossé sacré

Que l’excavation de la fosse et tout le rite de fondation étaient d’origine étrusque, comme déjà dit, nous avait été révélé par Varrone. Il devait en savoir un peu plus que les autres, car un de ses amis proches, un important astrologue romain était d’origine étrusque origine. Même Romulus, selon Plutarque (« Vie de Romulus »), aurait creusé un Mundus en fondant Rome. Les auteurs antiques étaient en désaccord sur son emplacement, sur le mont Palatin (selon Caton) ou dans le forum, près du comitium (d’après Plutarque). Or, on avait établi que la ville avait été fondée sur le Palatin. Enfin, le rite devait être célébré à l’aube. L’aube, c’était la naissance du jour nouveau, c’était un moment chargé de sens où il était facile de saisir les signes révélateurs de la volonté des Dieux. C’était l’instant où « le soleil touche les trois mondes, le ciel, la terre et les enfers et où les trois dimensions entraient en communication. « L’aube, c’était la condition pour franchir le seuil, du no man’s land dans lequel tout se raprochait dans une étreinte et le miracle de l’union des Mondes avait lieu. Alors, les portes du ciel s’ouvraient sur la terre ». Gottarelli

Mundus visiter le forum romain

Naissance de Rome

« Aucune ville étrusque n’a jamais grandi au hasard, comme un fouillis progressivement croissant d’habitations humaines« . Dès que le soleil d’or se lèvait, douze oiseaux sacrés descendaient du ciel et atterrissaient sur les lieux propices. Alors Romulus creusa la fossé (Mundus) et y jetta les prémices de la terre en s’écriant. « O Jupiter, assiste-moi dans ma traversée, et vous, père Mars, et vous, mère Vesta ; observez-moi tous, ô dieux il est pieux d’invoquer ! Sous vos auspices commence mon travail. Puisse, cette ville, avoir un long âge et un pouvoir sur le monde apprivoisé, et que le jour naisse et se couche sous elle. » (Ovide, Fasti) C’était alors que l’on prononçait le nom de la nouvelle ville Rome : le secret, public (exotérique), sacré. Juste après le sillon (pomerium, la limite sacrée qui séparait urbs de l’ager), ses hommes commençaient à façonner la terre pour dresser les murs. C’était le début de la légende de Rome. En revanche, les sources sont claires. Selon Ennio (Annales), Romulus et Remus, attendaient les auspices sur la colline avant l’aube. « Et ici la lumière éclatante réapparaît radieuse, poussée du ciel et en même temps, au loin, d’en haut, s’envolait un bel oiseau, de bon augure, provenant de gauche (Cicéron, De divinatione)

forum romain vu du Palatin

En guise de conclusion

L’ouverture de la porte établissait un contact avec les dieux Mani (protecteurs de la famille) et Pluton et Proserpine. D’ailleurs, la pierre fermant les deux mondes s’appelait la lapis manalis. Pour certain le Mundus était une une « voûte » céleste ou terrestre, doté d’une valeur de bon augure et de prévoyance des événements futurs. Mais, Le fait que Romulus jetta dans la fosse des prémices et ne sacrifia pas des animaux, fait penser à un ancien rite dédié à la Déesse de la Terre. Mais, Festus, historien latin du IVe siècle appelait la fosse « ostium Orci », autrement dit la porte de l’Orc, où Orco, qui était synonyme de Tartare ou Averne, monde des morts. Alors que, pour Plutarque, la fosse était le centre du sillon tracé par la charrue, tiré par un bœuf et une vache, animaux lié à l’ancienne Déesse. Quelque soit l’interprétation, pour revenir à Varron, il disait « qu’il valait mieux aller se battre quand la bouche de Pluton était fermée« , c’est-à-dire la bouche des enfers, il valait mieux fermer la port de enfers. Pour réserver votre visite de la Rome antique ésotérique écrivez à arterome2@gmail.com téléphonez de 18 à 21 heures au +393479541221.