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Palais Orsini

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Sur le théâtre de Marcel

L’un des appartements du palais Orsini, construit sur les ruines du théâtre de Marcel, la maison Litta est, depuis 1994 le siège de l’ambassade auprès du Saint-Siège de l’Ordre Souverain de Malte. Depuis peu, on peut visiter les quelques pièces qui le composent, en réservant. Il faut savoir que le palais Orsini s’installe sur le plus grand des théâtres antiques, posé au pied de la colline du Capitole. A partir du Moyen-Âge, le théâtre de Marcel subit de nombreuses transformations et changements de propriétaire. Il devient d’abord un lieu de défense, grâce à sa hauteur, ensuite une forteresse et pour finir en une magnifique résidence. Il est d’abord occupé par les Fabi dits Pescheria puis par les Pierleoni. Au XIVe siècle il est la propriété des Savelli. Les Savelli confieront à l’architecte Baldassare Peruzzi la transformation du palais Orsini. C’est à cette époque que le palais Orsini connaît son moment de splendeur maximale. Et ceci grâce au cardinal Giulio Savelli. Cet homme d’Église possédait une riche collection de sculptures antiques. Il avait même installé dans son palais un cercle littéraire. 

L’histoire du palais Orsini

En 1712, à la mort de Giulio Savelli, le dernier de cette noble famille, le palais est hérité par les Sforza Cesarini qui le vendent à la Congrégation des Barons. A la moitié du XVIIIe siècle au prix de 29 000 écus, Domenico Orsini l’achète. C’est alors que le palais Orsini prend l’aspect que nous lui connaissons. Dès les années 1930, la démolition des nombreuses maisons qui occupaient les arcades a permis de dégager le théâtre de Marcel. Cette partie dégagée correspondait au deuxième ghetto de Rome, situé à côté du principal en dehors des murs qui entouraient le grand Ghetto. On l’appelait le petit ghetto ou le Macelletto. Il était habité par des catholiques et des juifs. En tout 180 familles qui possédaient des greniers, des étables, des fours, destinés à nourrir les habitants du grand Ghetto. Les catholiques ont tenté plusieurs fois de fermer le Ghettarello et d’envoyer tous les juifs à l’intérieur des murs du principal Ghetto. Une première tentative de fermeture eut lieu en 1620. Mais en versant 1.000 couronnes d’or, une fortune, à l’État pontifical, la communauté juive de l’époque avait réussi à sauver le Ghettarello. Cet argent servira à la subsistance de la Maison des Catéchumènes, où les Juifs étaient amenés pour être baptisés de force.   

Casa Litta

Mais revenons au palais Orsini. Au siècle dernier, le bâtiment, qui repose sur les puissants arcs du théâtre de Marcel, a été divisé en plusieurs appartements. Une aile entière, de quatre étages avec terrasse, a été rachetée par Valeria Rossi di Montelera Litta Modignani. La terrasse donne sur le portique d’Ottavia, le Ghetto, les toits de Rome. On y apprécie son atmosphère et son passé millénaire, aujourd’hui plus vivant que jamais. Valeria Rossi di Montelera Litta Modignani transforme le palais en une magnifique résidence. C’est ainsi qu’est née la Casa Litta. A la mort prématurée de son fils Eugenio, Valeria Rossi di Montelera Litta Modignani fait don, en 1994, de son habitation à l’Ordre de Malte. Suite à ce don, l’ambassadeur Antonio Zanardi Landi s’est adressé à la marquise Giovanna Sacchetti présidente de la Fondation Giulio et Giovanna Sacchetti Onlus. « J’ai accueilli cette demande avec joie, dit Giovanna Sacchetti, car les missions de la Fondation consistent d’une part à soutenir la recherche scientifique, d’autre part à maintenir ce que j’aime appeler un « mécénat contemporain ». Elles visent à protéger, préserver, promouvoir le patrimoine historique, culturel et artistique. J’étais donc heureuse qu’après des années difficiles pour l’édifice, que l’ambassadeur Zanardi Landi me demande d’intervenir en faveur de ces salles si riches en trésors ».

L’ambassade

Aujourd’hui on accède à la Casa Litta, l’aile gauche du palais Orsini, par un joli petit jardin. C’est un oasis de paix et de silence à deux pas du Lungotevere, une voie bruyante à toutes les heures, qui longe les berges du Tibre. Dans le jardin, on voit encore, au milieu d’une verdure luxuriante, l’ours des Orsini. Il a l’air usé et fatigué. La Casa Litta, est juste au bout d’une petite montée, la façade colorée d’ocre comme de nombreux édifices romains. Passé la porte, nous attend une petite entrée simple, au pavement blanc et gris qui donne sur une autre pièce. Là, quelques portes peintes avec des personnages d’antan s’ouvrent sur une jolie rampe d’escalier en colimaçon. Arrivé sur le palier du premier étage, une petite voûte colorée de caissons blancs et beiges, percée d’une ouverture en guise de fenêtre, nous rappelle le Panthéon de Rome. Pour vous raconter la suite, ne pouvant pas filmer, j’ai pris des photos trouvées sur le Web en signalant la provenance.

La valorisation

La mise en valeur et la restauration, réalisée avec la Surintendance de Rome, ne concernent que quelques pièces. En tout, trois, décorées avec des meubles, des tapisseries, des objets qui vont de la période comprise entre les XVIe et XVIIe siècles tous provenant d’autres palais romains. Trois salles dans lesquelles il a fallu intervenir sur les plafonds à caissons en bois, les fresques aux murs, les huit tapisseries dont deux bruxelloises et les papiers en tissu sur les murs. Aujourd’hui, la lumière fait briller les papiers peints en soie d’origine. Ils étaient usés, endommagés et abîmés par des infiltrations d’eau. On les a remplacé, en les restaurant avec des matériaux tissés sur les motifs originaux. Les nouveaux tissus proviennent de la Tessitura Alois di San Leucio. C’est la même entreprise qui fournit encore aujourd’hui le Quirinal, le Vatican et la salle ovale de la Maison Blanche. « Je me souviens de la beauté de ce bâtiment, des déjeuners parfaits, des fleurs. Tout était soigné dans les moindres détails. Valeria Litta était une femme très généreuse ». Après avoir suivi avec passion et dévouement le travail des artisans, architectes, tapissiers qui ont redonné vie aux plafonds à caissons de la Chambre Verte, remplacé les papiers peints en soie des deux salles principales par de nouveaux tissus d’ameublement, restaurer certains éléments du mobilier, dit Giovanna Sacchetti, « je regarde déjà vers l’avenir ».

Image tirée du « Giornale Diplomatico »

La salle verte

Dans la salle verte, le plafond à caissons en bois et la frise peinte de jeux d’angelots ont été récupérés. Cette pièce enrichie de meubles de tapisseries et d’objets anciens est dominée par une magnifique table placée au centre de la pièce entre deux superbes lampadaires. C’est la table Borghèse réalisée par le sculpteur Alessandro Algardi au XVIIe siècle pour le cardinal Scipione Borghèse. C’est l’un des meilleurs exemples de mobilier baroque italien qui nous est parvenu. Un chef-d’œuvre de Algardi, que plus tard l’architecte Valadier va modifier. Autour du plafond à caissons, les chérubins malins semblent faire un clin d’œil aux deux bustes en marbre antique dont l’un est le portrait du terrible empereur Caracalla au regard trouble. Nous imaginons la comtesse Valeria Rossi de Montelera Litta originaire du nord de l’Italie à la rechercher d’objets d’art dans les palais et chez les antiquaires de la ville pour donner à sa demeure un caractère romain alors qu’à l’époque le style français dominait.

Image tirée de « Finestre sull’Arte »

La salle jaune

Dans la salle jaune, également dotée d’un important plafond à caissons, deux très précieuses tapisseries enrichissent les parois. Elles font partie d’une série de 11 exemplaires de « Paysages avec animaux », signé par le célèbre tapissier Jan Raes et tissé entre 1611 et 1614 dans la célèbre Manufacture Bruxelloise de Catherina van den Eynde. Ces deux tapisseries au pedigree important, ont été commandées par le cardinal Alessandro Peretti Montalto, le vice-chancelier de l’Église et le neveu du pape Sixte V. Elles passent ensuite aux Chigi, aux Torlonia et aux Sforza Cesarini. A propos de ces tapisseries, il existe une riche documentation. Effectivement, au début du XVIIe siècle, les nonces apostoliques à Bruxelles envoyaient des informations sur les tapisseries et tapisseries bruxelloises aux cardinaux romains. La plupart de ces artisans étaient installés dans le quartier des Marolles au cœur de Bruxelles. On sait qu’un contrat est signé avec Raes à Bruxelles par le nonce Guido Bentivoglio le 17 décembre 1614. Le 19 juillet 1614, la série finie est envoyée à Rome. Elle est exposée en un premier temps dans l’église de San Lorenzo in Damaso pour le fête de San Lorenzo, pour être plus tard placée dans la résidence du cardinal, Villa Peretti, sur l’Esquilin.   

Image tirée de « Finestre sull’Arte »

Les tapisseries

De plus amples informations nous disent que le cardinal Montalto avait payé ses tapisseries, très fines et toutes de soie, la forte somme de 28 florins par mètre carré. A la mort du cardinal Montalto (1623) la série passe en héritage à son frère, le prince Michele Peretti Montalto et en 1631, au fils de ce dernier, le cardinal Francesco Peretti Montalto. Dans l’inventaire des biens de ce dernier, moitié du XVIIe siècle, la série est encore complète. C’est plus tard que le démembrement commence. Le léopard surplombant l’étang, qui décide de se diriger, d’un pas doux et feutré, vers un petit canard, a retrouvé son ancienne fraîcheur et toute sa lumière. Dans la salle à manger aux tonalités rouges, des musiciens et des danseurs, des chameaux et des dompteurs brillent sur les sublimes tapisseries de Grottesche. Les motifs ont été dessinés par Jean-Baptiste Monnoyer et fabriqués en France, dans la manufacture de Beauvais, entre 1690 et 1711. Jean-Baptiste Monnoyer, dit Baptiste, originaire de Lille, était un peintre français. Il s’était spécialisé dans la peinture de natures mortes de fleurs et de fruits. Il était attaché aux ateliers de tapisserie des Gobelins et à ceux de Beauvais, pour lesquels il réalisait des cartons de fruits et de fleurs.

Image tirée de « Finestre sull’Arte »

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